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Walter Spanghero : le dur à cuir

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“Cuir”, pas “cuire”. Ce qui compte avant tout pour Walter Spanghero, c’est le ballon (de rugby) et la famille (7 soeurs et frères). C’est l’un des plus grands joueurs de rugby de tous les temps. Sélectionné plus de 50 fois en Equipe de France et après 14 saisons passées à Narbonne, il se raconte (un peu) en quatre séquences.

Mon identité

J’ai grandi au “Brésil”, je n’aurais pas dû me prénommer “Walter”, ni m’appeler “Spanghero”, mon père se prénommait “Dante” et j’ai failli ne pas jouer à Narbonne. Ca vous va ? Non ? Eh bien pourtant, tout est vrai.  

Le “Brésil”, c’était le nom donné au terrain que mes parents avaient en fermage, dans l’Aude, à Payra-sur-l’Hers, pas loin de Bram. Mon père, qui était un Italien originaire du Frioul, au Nord du Pays, voulait que je porte le prénom “Walter”, lequel était courant dans l’univers saxon qui irriguait le Frioul italien. Cela étant dit, “Walter”, dans le Sud de la France, en 1943, c’était mal vu. Quant au nom “Spanghero”, j’aurais pu effectivement ne pas le porter, car le propriétaire des terres confiées à mes parents en fermage n’avait pas d’enfant et il aurait bien voulu m’adopter. Je ne me serais alors plus appelé Spanghero !

Mr M. Hutchens / Walter Spanghero / Benoit Dauga / General Fayet / Claude Lacaze / Christian Carrere – 27.06.1968 – Ambassade de Nouvelle Zelande a Paris-
Photo : Photoshot / Icon Sport

En ce qui concerne mes débuts dans le rugby, cela a été également compliqué. Mon père jouait déjà au rugby, à Bram. Nous étions 6 frères et nous avons tous pratiqué ce sport. Moi, j’étais le troisième de la famille et j’ai fini troisième ligne centre : il n’y a pas de hasard. Bref, j’avais un “potentiel” important, selon les recruteurs. Ceux qui avaient le plus d’argent, à l’époque, c’étaient ceux du rugby à XIII. J’avais fait une tournée en Australie avec le XIII de France. J’en suis revenu éreinté et je ne pensais plus qu’à trois choses : une bonne soupe de l’Aude, un beau steak et mon lit ! Par ailleurs, le “treize” permettait aux joueurs de percevoir un petit salaire, ce qui n’était pas le cas du rugby à XV, où tout le monde était amateur et n’avait aucune rémunération directe. A l’époque, nous n’étions payés qu’avec des poignées de mains, plus ou moins utiles… Finalement, j’ai été davantage séduit par le rugby à XV et trois clubs me faisaient des offres alors que je n’avais que 17 ans : Béziers, Mazamet et Narbonne. Comme je n’avais que 17 ans et – donc – pas le permis de conduire… Mazamet ? Cela pouvait me tenter, mais il fallait traverser la Montagne Noire, ce qui n’était pas possible. Béziers ? C’était une autre opportunité, mais ça me paraissait bien loin. Narbonne, c’était l’idéal : mon département, des trains, la famille à proximité…      

Les moments forts

En ce qui concerne ma carrière au rugby, il y a eu beaucoup de moments forts, entre mes 14 saisons à Narbonne, mes deux saisons à Toulouse et mes 51 sélections en équipe de France. Je ne ferai pas le détail des moments forts, des victoires et des défaites, qui ont rythmé ma vie de joueur. Je me souviens tout d’abord des autres joueurs, des copains, de ceux avec qui nous sommes devenus amis; Et puis je me souviens des quelques matchs que nous avons joué ensemble, les quatre frères Spanghero. Ca, ça avait de l’allure.

En ce qui concerne les dates, je n’en donnerai que quelques unes: 1961, celle de mon premier match à Narbonne (où j’ai joué jusqu’en 1975), 1964, celle de ma première sélection en équipe de France, 1967, avec la tournée en afrique du Sud et la victoire au Tournoi des Cinq Nations, 1968, avec le Grand Chelem au Tournoi des Cinq Nations, 1969, avec la victoire au Tournoi des Cinq Nations…

La vie après le rugby, c’est essentiel

J’ai toujours pensé que le rugby était un moyen et pas une fin. Concrètement, c’était le moyen d’arriver un peu plus rapidement que les autres, parce qu’on pouvait ouvrir davantage de portes et rencontrer plus de monde. Pour le reste, personne ne vous attendait. Il fait tout de même se rappeler que l’on ne touchait rien en club et que, en équipe de France, on ne percevait que 7 francs par jour, soit un peu plus d’une euro. Nous prenions de train en seconde classe, mais, pour ça, on ne pleurait pas ! A 32 ans, en 1975, j’ai pris la décision d’arrêter le rugby à Narbonne, deux ans après avoir arrêter de jouer en équipe de France. Finalement, j’ai repris le rugby à Toulouse, de 1977 à 1977. On peut difficilement comprendre cette période si on ne s’intéresse pas au parcours professionnel que j’avais débuté dès l’âge de 21 ans dans une banque, au Crédit Agricole de Caracassonne. Trois ans plus tard, j’avais la conviction qu’il y avait quelque chose à faire dans la région dans le domaine de la location de voiture. En 1969, alors que je jouais à Narbonne et que le XV de France gagnait le Tournoi des Cinq Nations, j’ouvrai ma première agence de location de voitures. Deux ans plus tard, j’ouvre une seconde agence, à Toulouse, où je m’installe en 1972. Mon activité ne cessait de croître, mais cela s’éloignait logiquement de Narbonne. L’entreprise comptait tout de même 6 agences, dont quatre à Toulouse, et gérait un milliers de cartes grises. Cela m’occupait beaucoup. En 2002, à l’approche de la soixantaine, j’ai décidé de revendre mon affaire (note de la rédaction : à une filiale de la Caisse d’Epargne). Depuis, je me suis occupé d’une entreprise de pièces détachées de véhicules mais je gère principalement les intérêts des Sociétés Civiles Immobilières que j’ai développées. A 74 ans, malgré quatre opérations de la hanche, je suis donc toujours actifs.

Walter Spanghero dans son bureau

Voici à quoi m’a servi le rugby dans la vie professionnelle

Comme je l’ai dis, si tu ne commence pas à t’intésser à ta vie professionnelle avant la fin de ta carrière de joueur, le rugby ne te sert pour ainsi dire à rien. Dans les faits, il te sert surtout à avoir des beaux souvenirs : les matches avec mes frères, la tournée en Australie dont nous sommes sortis invaincus,  la victoire contre l’Angleterre en 1972, la victoire contre les All-Blacks en 1973, etc. Dans les faits, le rugby m’a principalement servi à deux choses dans ma vie professionnelle : à savoir gérer plusieurs tâches – et donc à être polyvalent – et à savoir gérer une équipe. En l’occurrence, j’ai su occuper plusieurs fonctions en tant que joueur en passant du poste de deuxième ligne au poste de troisième ligne centre (le n°8, mon poste de prédilection). Par ailleurs, j’ai été entraîneur à de nombreuses reprises et cela m’a beaucoup aidé par la suite, sachant que mon entreprise a compté jusqu’à 40 salariés. Il faut se souvenir que jusqu’à la fin des années 1960, le titre d’entraîneur était honorifique. C’est le capitaine qui prenait quasiment toutes les décisions, depuis la définition de la tactique jusqu’à la gestion des joueurs.    

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