Début novembre, la Ligue Nationale de Rugby a publié les résultats d’une étude sur l’évaluation économique du rugby professionnel. Pour la saison 2018-19, les clubs de rugby professionnel et les championnats de TOP 14 et PRO D2 ont généré 1,25 milliard d’euros d’activité économique pour les territoires. Thomas Otton, Directeur Communication et RSE de la Ligue Nationale de Rugby, explique pourquoi la LNR a publié cette étude.
BranchezRugby – Pourquoi avoir réalisé cette étude ?
Thomas Otton – C’est important de rappeler que le rugby est le deuxième sport français et cela ne se traduit pas uniquement en termes d’audience mais aussi en termes de retombées économiques. Les trente clubs professionnels ont un poids économique très important dans leur territoire puisque il est évalué à 1,25 Milliards d’€. L’objectif était de structurer et de formaliser le rôle et l’impact d’un club de rugby dans son territoire.
BranchezRugby – En plus de ces informations économiques, quel était le message que vous vouliez faire passer ?
Thomas Otton – Le message est assez clair : le rugby apporte énormément sur le plan social mais aussi sur le plan économique puisqu’il reverse de l’argent aux territoires via les 4000 emplois directs et indirects, les prestataires, etc. Le rugby crée de la valeur et constitue un actif central des territoires. Aujourd’hui, le rugby a besoin d’aide car les clubs sont financièrement au bord du précipice.
BranchezRugby –Que demande la LNR comme aides ? Et à qui la demande-t-elle ?
Thomas Otton – Le passage à huis-clos a complètement étouffé l’économie des clubs qui vivent essentiellement de l’accueil du public et des partenaires les jours de matchs qui constituent entre 60 et 70% de leurs revenus. Les droits TV ne représentent en moyenne que 20% des recettes. Un match de saison régulière de Top 14 accueille 14 000 spectateurs en moyenne. Nous avions estimé les pertes pour l’ensemble des clubs à 54 millions d’euros sur une jauge à 5 000 personnes du 1er septembre au 31 décembre. Puis une jauge à 1 000 personnes a été établie et en ce moment nous sommes à huis clos avec donc une perte totale de revenus issus de la billetterie et des partenariats. La perte estimée est de 180 millions d’euros pour les trente clubs pour une demi-saison à huis clos.
BranchezRugby – Que souhaiteriez-vous ? Une dotation de l’Etat équivalente à cette perte ? Des allégements fiscaux ?
Thomas Otton – Il y a déjà eu des actions et des mesures solidaires de la part des joueurs, des abonnés, des partenaires, de l’encadrement sportif, des actionnaires mais aujourd’hui nous avons besoin du Gouvernement. Concrètement, nous avons besoin à court terme d’un fonds de compensation que l’Etat s’est engagé à créer mais dont la répartition entre les sports n’a pas été communiquée. Ce fonds de compensation calculé sur les jauges à 5000 spectateurs sera de toute façon trop faible et il devra être réévalué. Nous attendons aussi une exonération totale des cotisations sociales qui serait une mesure directe et rapide à impact immédiat.
BranchezRugby – Et une reprise des matchs en janvier avec du public est-elle murmurée, annoncée ou envisagée ?
Thomas Otton – Rien n’est décidé mais quand le public sera à nouveau accueilli dans les stades, la participation s’établira selon un pourcentage de jauge plutôt qu’une jauge fixe comme c’était le cas jusqu’à présent.
BranchezRugby – Que peut-on imaginer comme solutions digitales pour engager la communauté des fans du rugby ?
Thomas Otton –Nous sommes au cœur du sujet avec des compétitions qui n’ont pas eu lieu entre Mars et Septembre 2020. Lors du premier confinement alors qu’il n’y avait plus de compétitions, nous avons recréé une expérience fan de toutes pièces. Nous avons pu le faire grâce à des émissions où l’on avait invité des joueurs en visioconférence. Nous avions eu un point d’orgue le 05 mai dernier avec huit heures de direct appelé le Top 14 à domicile. Nous étions en direct avec des joueurs à leur domicile, des chanteurs, des humoristes et tout cela pour une bonne cause : l’association Les Petits frères des Pauvres. En ce moment, le championnat a repris et nous avons donc du contenu sportif à diffuser mais nous devons garder un lien personnel et de proximité avec les joueurs via des visioconférences avec les fans par exemple.
BranchezRugby – Après la séquence Covid, quelle sera la stratégie digitale de la LNR pour renforcer les liens avec les fans ?
Thomas Otton – Nous n’avons pas attendu le Covid pour parler d’autre chose que de compétition car le rugby est plus qu’un sport, c’est une culture avec de l’art, de l’humour, de la musique, des voyages, de la gastronomie. Nous avions déjà de quoi communiquer. C’est ce qui plait et c’est ce qui va attirer de nouveaux publics.
BranchezRugby –Pourquoi ne pas profiter de cette crise du Covid pour inverser le calendrier avec un lancement de saison au printemps et des phases finales à l’automne ?
Thomas Otton – Ce n’est pas à l’ordre du jour notamment parce que l’été il fait chaud et qu’il faut faire très attention à la condition physique des joueurs. Et puis les gens sont en vacances donc moins présents dans les villes pour aller au stade. Le Top 14 est un championnat qui plait parce qu’il est récurrent, qu’il a une forte intensité, qu’il reste imprévisible. Ce succès est dû à un feuilleton étalé sur dix mois et si on l’arrête sur plusieurs mois, on perdra l’intérêt des fans. Nous avons un modèle qui fonctionne très bien économiquement même si actuellement il est touché fortement par le Covid.
Pour découvrir l’étude : https://www.lnr.fr/actualites/le-rugby-professionnel-genere-1-25-mdeu-d-activite-economique-pour-les-territoires-sur-la