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Gérard Sutra : « Ce que j’ai, c’est le rugby qui me l’a donné, je me devais de le rendre »

Gerard-Sutra-NB
Gérard Sutra avait tout juste 10 ans lorsqu’il a foulé pour la première fois la pelouse de Cassayet. Intégré dans l’équipe 1ère du Racing Club Narbonne Méditerranée à 16 ans et demi, au poste de n°9, il sera 4 fois sélectionné en équipe de France et vainqueur du Tournoi des Cinq Nations en 1970. Puis il deviendra entraîneur et offrira à Narbonne le Bouclier de Brennus en 1979. Autoportrait.

A l’origine…

Je suis né à Narbonne le 21 mars 1946 dans une famille où l’on aimait le rugby. Et aussi loin que je me souvienne, la pire des punitions qu’on pouvait m’infliger lorsque j’étais gamin, c’était de me priver de match. Cela arrivait de temps en temps. Mais comme mon père était un supporter assidu, ma mère me laissait lui emboîter le pas pour le stade dès qu’il avait tourné les talons, à condition que je sois de retour avant lui…
J’ai commencé ma carrière de rugbyman à 10 ans avec les « Poussins » du Racing Club Narbonne Méditerranée. J’ai rejoins l’équipe 1ère à 16 ans et demi au poste de n°9. J’étais « Cadet » à l’époque et ce souvenir restera toujours un des plus grands moments de fierté de ma vie.

Comme je ne pensais qu’au rugby et que je ne faisais rien à l’école, mon père m’a suggéré de chercher du travail. Là encore, je dois énormément à l’écosystème du rugby narbonnais, en particulier à Bernard Pech de Laclause qui a présidé le RCNM pendant plus de 20 ans. Leur solidarité et leur confiance m’ont permis d’entrer comme agent temporaire à la perception de Narbonne, puis j’ai travaillé à la mairie comme moniteur d’éducation physique. J’avais de l’ambition et, à 21 ans, j’ai pu monter mon premier magasin de sport, « Sutra Sports » à Narbonne (ndlr : aujourd’hui « Nivelle Sports »), puis j’ai lancé des affaires saisonnières à Narbonne-Plage, à Saint-Pierre-La-Mer et aux Cabanes de Fleury, que j’ai revendues ensuite car mes deux filles ne souhaitaient pas les reprendre.

L’école du rugby

J’ai joué pendant 13 ans au RCNM comme demi de mêlée. J’ai été 4 fois sélectionné en équipe de France et vainqueur du Tournoi des cinq nations en 1970. Ce que m’a appris le rugby ? Le travail, l’ambition, l’honnêteté, l’entraide, la convivialité, le respect, la passion… Pour l’anecdote, quand j’étais jeune on pratiquait l’arbitrage par punition et comme j’avais insulté un arbitre, j’ai écopé de 3 mois de suspension avec arbitrage. J’ai arbitré 8 rencontres : 8 victoires à domicile ; j’étais le seul à connaître la fin des matchs…  Une fois, j’ai même sauté sur un joueur pour l’empêcher de marquer. Plus sérieusement, on pratiquait à l’époque un rugby d’évitement (et non d’affrontement comme aujourd’hui) et le « cadrage débordement » m’a permis de contourner un certain nombre de difficultés, sur le terrain comme dans la vie. Même si au final, 7 méchantes entorses ont eu raison de mes genoux. J’ai dû arrêter de jouer en 1976 et, comme j’étais encore jeune, je suis devenu entraîneur. Il fallait tourner la page.

Le RCNM pour la vie

En même temps, cette transition s’est opérée tout naturellement. J’entraînais des joueurs avec qui j’avais joué et je défendais les couleurs du club dans lequel j’avais grandi. Je me souviens pourtant de deux décisions qui n’ont pas été faciles à prendre : remplacer Jo Maso par Didier Codorniou, et sélectionner un pilier (Guy Martinez en l’occurrence, au détriment de Jo Provençale) pour la finale du championnat de France de 1979. Pour constituer l’équipe de cette rencontre mémorable, je me suis servi de l’expérience de 1974 : notre défaite en finale face à Béziers (16 à 14), mon pire souvenir de rugbyman. Je me suis appuyé sur les anciens, le capitaine Claude Spanghero, Sangalli, Bénacloi, Salettes, Montlaur, Pariès…, ainsi que sur de jeunes joueurs (Malquier, Codorniou, Colomine, Ramon, Martinez, Delmas), tous portés par la même volonté de devenir champions de France. La sauce a bien pris.

La victoire du RCNM (10 à 0) contre Bagnères-de-Bigorre (voir la vidéo du match) reste un grand moment de ma vie d’entraineur, car Narbonne n’avait plus remporté ce titre depuis 1936. Autre très bon souvenir : notre victoire en 8ème de finale contre Mont-de-Marsan à Pau. Tout Narbonne avait fait le déplacement. C’était la victoire de toute une ville, une immense joie partagée. Nous l’avons fêté pendant un mois… Dans le cadre de mon parcours, j’ai également entraîné le Fleury Olympique (ndlr : club de rugby de Fleury d’Aude), couronné 3 fois en Honneur, 3ème division et 2ème division. Mais j’ai finalement décidé de mettre un terme à ma carrière d’entraîneur, je ne souhaitais pas devenir professionnel et puis au fond, je n’étais fait que pour Narbonne…

Aujourd’hui, je suis membre du Conseil d’Administration du RCNM et je préside l’association des « Socios du RCNM » (230 membres), qui n’a aucun pouvoir de décision sur le club mais qui le soutient financièrement (ndlr : 190 000 euros de dons en 2016). Nous avons également une amicale des anciens joueurs et beaucoup d’entre eux investissent dans le club. Le rugby c’est une famille ! Et puis on dit qu’un club sans mémoire est un club sans avenir, nous avons donc beaucoup de chance car le RCNM est riche de 110 ans d’histoire.

Le Brésil : un pays de foot et de… rugby

Je suis tombé amoureux du Brésil au début des années 80, de la joie de vivre et de l’insouciance des Brésiliens, de ce mélange des cultures, de la beauté époustouflante des paysages… En 1993, je suis parti m’installer à Buzios, un petit coin de paradis bordé de plages somptueuses, où j’ai acheté une villa et créé des chambres d’hôtes. Pendant 20 ans, j’y ai accueilli tout le milieu du rugby narbonnais. Chaque année, nous organisions un tournoi international des vétérans. J’ai passé là les plus belles années de ma vie, puis j’ai fini par revendre mon affaire pour rentrer à Narbonne. Cela fait un moment que je n’y suis pas revenu, mais à la fin de la saison je vais refaire un voyage au Brésil avec mon petit-fils, Paul Belzons, 3ème ligne dans l’équipe 1ère du RCNM. Paul, qui est aussi le petit-fils d’André Belzons et le fils de Gilles Belzons, est le 3ème « Bébelle » à occuper ce poste. Il a en lui l’ADN du RCNM, du sang orange et noir dans les veines…

Gérard Sutra

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